Le docteur en agroclimatologie et son look atypique était l’invité d’un forum sur le réchauffement organisé ce mardi 19 novembre par la Chambre …
Le docteur en agroclimatologie et son look atypique était l’invité d’un forum sur le réchauffement organisé ce mardi 19 novembre par la Chambre d’agriculture au lycée agricole des Sardières. Un sujet brûlant…
Emmanuel Marquez –
Aujourd’hui à 06:20
– Temps de lecture :
|
Alors que la contestation gronde depuis le début de la semaine sur les ronds-points de France et de Navarre à propos du traité de libre-échange Mercosur avec l’Amérique du Sud, une autre frange de notre agriculture réfléchit à son avenir. En marge du G20 qui vient d’entamer ses travaux à Rio au Brésil, parallèlement à ceux de la COP 29 qui se tient actuellement à Bakou en Azerbaïdjan… Dans les locaux du lycée agricole des Sardières, la Chambre de l’Agriculture organise ce matin-là un Forum sur le Climat avec Serge Zaka en invité d’honneur.
Sous son chapeau à plume, cet ingénieur agronome également docteur en agrométéorologie et agroclimatologie vient délivrer un message de bon sens qui consiste tout simplement à « anticiper le changement climatique et les dérèglements qui l’accompagnent ». En un mot : il n’y a plus de saison, ou en tout cas, « la saisonnalité d’aujourd’hui ne sera pas celle demain ». Gel tardif de 2021, épisodes de sécheresse en 2022 , douceur hivernale, excès d’humidité en 2023 et 2024 , etc. Une réalité planétaire que les agriculteurs constatent au premier chef. Et avec laquelle leurs successeurs auront à composer à l’horizon de 20 à 30 ans. C’est pour cette raison que le scientifique s’adresse en priorité aux élèves du lycée qui ont pris place au fond de la salle et non pas aux professionnels et élus assis aux premiers rangs.
Comment le changement climatique impacte-t-il notre agriculture ? Les productions, l’élevage, la gestion de l’eau, etc. ? Pendant 45 minutes chrono, Serge Zaka a tenu le public en haleine, rappelant que les conséquences du réchauffement dans une hypothèse à +3° d’ici 2100 se feront aussi sentir en termes géopolitiques, les différentes cultures n’étant qu’une pièce parmi beaucoup d’autres de ce puzzle mondial où les puissances d’aujourd’hui ne seront plus celles de demain. Une redistribution des cartes à laquelle notre agriculture et toutes ses filières socio-économiques doivent s’adapter dès à présent pour continuer d’assurer ce rôle nourricier. « La hausse des températures est sans doute une bonne chose pour le tourisme, ça l’est moins pour l’agriculture » illustre Serge Zaka.
C’est ainsi qu’on assiste à un déplacement de la plupart des cultures du Sud vers l’Europe septentrionale. « À l’horizon 2070, confrontée à la désertification et à son déficit de ressource en eau, l’Espagne ne sera plus en mesure de produire ses tomates en été », avance Serge Zaka. « Au contraire de la France et du département de l’Ain où elle sera une culture d’avenir ! »
Même décalage de saisonnalité pour le maraîchage (salade, carottes, poireaux, etc). Pour la vigne que l’on vendange un peu partout de plus en plus tôt. Pour l’arboriculture fruitière qui a à la fois besoin de froid pour voir fleurir ses arbres, et pour qui le gel constitue le meilleur des insecticides. Pour l’élevage puisque l’indice de taux d’humidité (THI) influence à court terme le stress animal et à moyen ou long terme la qualité de l’alimentation du bétail, et donc la qualité de sa production. Pour l’activité céréalière et celle du blé en particulier
À l’inverse, quand elle ne le fait pas déjà, y compris dans le département, l’agriculture française va devoir se spécialiser dans d’autres cultures qui n’ont potentiellement rien de « locales » comme la patate douce, la cacahuète ou le pois chiche. Ce n’est pas de la science-fiction, juste de l’anticipation…