Patrick Pouyanné s’attire à nouveau les foudres des ONG qui dénoncent la présence de trop nombreux lobbyistes des énergies fossiles à Bakou.
Patrick Pouyanné s’attire à nouveau les foudres des ONG qui dénoncent la présence de trop nombreux lobbyistes des énergies fossiles à Bakou.
Venu passer la journée à la COP29 à Bakou, le PDG TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a défendu vendredi les actions du secteur en faveur de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. «Oui, nous sommes une partie du problème» climatique, mais «nous sommes dans une logique de progrès continu», même «si on ne va jamais assez vite» aux yeux de la société, a-t-il expliqué à l’AFP, après avoir participé à son premier événement public de la journée: un échange sur le pavillon de l’Azerbaïdjan avec Rovshan Najaf, le président de la compagnie pétrolière nationale Socar, et Fred Krupp, président de l’Environmental Defense Fund, une ONG américaine.
Le patron français a qualifié de «signal important» l’accord conclu l’an dernier à la COP28 de Dubaï pour avancer vers une sortie progressive des énergies fossiles. Mais «il ne faut pas croire qu’en six mois/un an, tout ça va s’arrêter», dit-il, rappelant que la demande des Européens en gaz a récemment augmenté.
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Comment les compagnies pétrolières font la chasse au méthane
Les majors pétroliers mettent l’accent sur la réduction des émissions de méthane. Ce gaz est le deuxième gaz à effet de serre le plus important après le CO2. Doté d’un pouvoir de réchauffement trente fois supérieur à celui du dioxyde de carbone, «le méthane augmente plus rapidement en termes relatifs que tout autre gaz à effet de serre majeur et est aujourd’hui 2,6 fois plus élevé qu’à l’époque préindustrielle», rappelle le CEA. TotalEnergies et Socar se sont déclarées prêtes à collaborer pour réduire leurs émissions. À la COP28 à Dubaï, 52 compagnies pétrogazières s’étaient engagées à atteindre «près de zéro méthane» dans leurs opérations d’ici 2030. Cette année, elles sont 55 à avoir pris cet engagement, ce qui, selon le patron de TotalEnergies, représente 45% de la production mondiale.
«Donc si ces 45% font des progrès, je suis sûr qu’on va en inviter d’autres» et «avec les technologies, sur le méthane, on peut ramener nos émissions près de zéro», a estimé Patrick Pouyanné. «Il est fondamental que nous agissions ensemble», car «l’industrie pétrolière ce n’est pas que les grands majors, c’est aussi tout un tas de compagnies nationales» qui n’ont pas forcément tous les outils, ne serait-ce que pour mesurer leur niveau d’émissions, ni la même culture de la transparence, a expliqué le PDG. Jeudi, le groupe annonçait qu’il allait «atteindre dès 2024, avec un an d’avance, son objectif à 2025 d’une réduction de 50 % de ses émissions de méthane par rapport à 2020. TotalEnergies est donc en bonne voie d’atteindre son objectif de 80 % de réduction à l’horizon 2030». Il s’appuie pour cela sur des outils de détection des fuites de méthane, qu’il met aussi à disposition de ses paires.
Une étude du Think Tank engagé dans les sujets financiers et climatiques, Carbon Tracker dénonce, elle, d’«importantes lacunes» dans les plans des géants des hydrocarbures sur la chasse au méthane, faute par exemple de couvrir les coentreprises qu’ils n’exploitent pas et dans lesquelles ils ont des participations. Les ONG dénoncent aussi l’importante présence de lobbyistes des énergies fossiles à la COP. Une coalition d’ONG, Kick Big Polluters Out («Virons les gros pollueurs», KBPO), qui regroupe 450 ONG, estiment que 1773 lobbyistes représentent les intérêts des producteurs d’énergies fossiles cette année à Bakou, sur 53.000 personnes accréditées cette année (hors personnel technique et organisateurs), selon l’ONU. «Il est malheureux que le secteur des énergies fossiles et les pétro-Etats aient pris le contrôle du processus de la COP, à un niveau qui n’est pas sain», a jugé l’ancien vice-président américain Al Gore, présent ici.