Crise migratoire : l’Espagne signe des accords bilatéraux avec la Gambie et la Mauritanie

Le chef du gouvernement socialiste espagnol, Pedro Sanchez, est rentré jeudi dernier d’un voyage de trois jours au Sénégal, en Gambie et en Mauritanie, où il a tenté de trouver des solutions à la crise migratoire à laquelle fait face l’archipel espagnol des Canaries, porte d’entrée de l’Europe pour des milliers d’Africains. Situé dans l’océan Atlantique, l’archipel a reçu, depuis le début de l’année 2024, 22 300 migrants arrivés à bord d’embarcations de pêche traditionnelles, les « cayucos », soit plus du double par rapport à l’an dernier.

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La majorité d’entre eux sont originaires du Mali (43 %) et du Sénégal (20 %), suivis par des Marocains (9 %) et des Mauritaniens (8 %). Parmi eux, de nombreux mineurs : au moins 5 100 enfants et adolescents arrivés seuls.

Un cadre concerté d’entrée régulière sur le sol espagnol

La route migratoire d’Afrique occidentale est devenue l’une des principales voies d’accès vers l’Espagne du fait de l’instabilité qui secoue le Sahel, notamment au Mali et au Sénégal, provoquant d’importants déplacements de population. À l’inverse, le mouvement migratoire vers l’Italie connaît une accalmie, à la suite des mesures de contrôle renforcées de part et d’autre de la Méditerranée. Si la route centrale, entre la Tunisie et la botte italienne, demeure le principal couloir vers l’Europe, les autorités ne dénombrent ainsi que 40 000 arrivées par voie maritime depuis le début de l’année, en baisse de 64 % par rapport à l’an passé.

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Les trois pays de départ de la majorité des migrants sont la Mauritanie, la Gambie et le Sénégal. Pour tenter d’enrayer le flot des traversées, l’Espagne a signé avec la Mauritanie et la Gambie des « mémorandums d’entente » bilatéraux de « migration circulaire », selon le gouvernement espagnol. Soit un cadre concerté d’entrée régulière sur le sol espagnol de travailleurs formés en fonction des besoins de l’économie espagnole – notamment des saisonniers agricoles – qui s’engagent ensuite à revenir dans leur pays à l’expiration de leur contrat. Cette migration contrôlée est censée donner une place particulière aux jeunes et aux femmes. Madrid a aussi signé avec ses deux partenaires des textes en vue de renforcer la collaboration contre la criminalité organisée sous toutes ses formes.

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Le projet pilote de « migration circulaire », d’une durée initiale d’un an, prévoit que l’Espagne communiquera des offres d’emploi (elle n’a pas publié de chiffres) aux pays qui sélectionneront des candidats. Ils passeront des entretiens et le cas échéant des tests, devront obtenir un visa et signer un contrat à la fin duquel ils s’engagent à repartir dans leur pays.

L’immigration en débat en Espagne

En Espagne, la visite de Pedro Sanchez et ses propos ont soulevé de vives réactions politiques, notamment à droite. Le leader du Parti populaire (PP, droite conservatrice), Alberto Núñez Feijóo, n’a pas manqué de répliquer : « Il est irresponsable d’encourager un effet d’appel au milieu de la pire crise d’immigration clandestine », a-t-il lancé mercredi sur X, accusant le chef du gouvernement de « promouvoir l’Espagne comme pays d’accueil », « à l’inverse des autres pays de l’Union européenne », où l’heure est plutôt au durcissement.

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Le débat sur l’immigration clandestine en Espagne était jusqu’alors relativement limité par rapport aux autres nations européennes : compte tenu de l’histoire de ce pays, longtemps tourné vers l’émigration, cette question n’y a jamais eu le même poids politique qu’en France, en Allemagne ou au Royaume-Uni.

 

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