L’économie sénégalaise a enregistré une croissance inférieure aux attentes au cours du premier semestre de 2024, selon les conclusions des services du Fonds monétaire international (FMI) à l’issue de leur mission à Dakar, qui s’est tenue du 5 au 12 septembre.
Le Fonds monétaire international a récemment achevé sa mission d’inspection des finances publiques du Sénégal. Il ressort de cette mission que la croissance du Produit intérieur brut (PIB) réel s’est établie à 2,3 % au premier trimestre, et que les indicateurs de conjoncture laissent présager un ralentissement similaire au deuxième trimestre. Ce fléchissement est attribué à une « activité plus faible dans les secteurs minier, de la construction et agro-industriel, et, dans une moindre mesure, dans le secteur primaire », précise le communiqué final de la mission. Concernant l’inflation globale, celle-ci a ralenti pour atteindre une moyenne de 2,2 % en glissement annuel au premier semestre, en raison de la baisse des prix internationaux des matières premières et d’une demande intérieure modérée.
Faible niveau de recouvrement fiscal
L’exécution budgétaire à fin août a révélé un manque à gagner significatif en matière de recettes, alors que les dépenses sont restées globalement conformes aux prévisions. En conséquence, le déficit budgétaire s’est aggravé et, face à la faiblesse des marges de liquidité, les autorités ont dû recourir à des emprunts commerciaux externes à court terme, particulièrement coûteux.
Les perspectives macroéconomiques pour le reste de l’année 2024 demeurent préoccupantes. La croissance du PIB réel est désormais révisée à 6,0 %, contre une prévision initiale de 7,1 % en juin 2024. Le secteur hors hydrocarbures devrait connaître une croissance de 3,3 %, en baisse par rapport à une projection antérieure de 4,8 %. Quant à l’inflation globale, elle devrait s’établir à 1,5 % en glissement annuel. Le déficit du compte courant devrait se réduire à 12,7 % du PIB, en raison du démarrage de la production d’hydrocarbures, malgré une performance modérée des exportations hors hydrocarbures. En l’absence de mesures budgétaires supplémentaires, le déficit budgétaire devrait excéder 7,5 % du PIB, bien au-delà des 3,9 % prévus dans le budget initial, en raison de la baisse des recettes et de l’augmentation des dépenses liées aux subventions énergétiques et aux paiements d’intérêts. Par conséquent, la dette de l’administration centrale devrait rester supérieure au critère de convergence fixé par l’UEMOA à 70 % du PIB.
Endettement et coût élevé du service de la dette
À défaut de mesures additionnelles, l’objectif de ramener le déficit budgétaire de l’UEMOA à 3 % du PIB d’ici 2025 pourrait être retardé. Dans ce contexte, les autorités sont encouragées à mettre en œuvre des réformes majeures, notamment la rationalisation des exonérations fiscales et la suppression progressive des subventions énergétiques non ciblées et coûteuses, afin d’atteindre rapidement l’objectif de réduction du déficit budgétaire et de placer la dette publique sur une trajectoire descendante. En outre, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour résoudre l’accumulation d’impayés envers les entreprises privées, en particulier dans les secteurs de la construction et de l’énergie. Un inventaire de ces passifs devrait être réalisé, accompagné d’un plan d’apurement avec un calendrier crédible et transparent, afin de garantir leur règlement dans des délais raisonnables.
Des efforts supplémentaires sont également requis pour accélérer les réformes structurelles, notamment la révision de la formule de tarification des produits pétroliers, la poursuite du diagnostic des coûts de production de l’électricité, ainsi que l’amélioration de la viabilité financière de la société nationale d’électricité, SENELEC. Ces réformes incluent la mise en place d’une nouvelle structure tarifaire de l’électricité, intégrant un tarif social destiné à protéger les ménages vulnérables.
Le FMI encourage la sortie de la « liste grise »
Dans le domaine financier, le personnel du FMI salue les progrès réalisés dans la mise en œuvre des recommandations du Groupe d’action financière (GAFI), visant à faciliter la sortie du pays de la « liste grise ». Ces efforts devraient renforcer le climat des affaires et améliorer la confiance économique générale.
Les autorités sénégalaises ont réaffirmé leur engagement en faveur des réformes soutenant le programme appuyé par le FMI. Elles ont également réitéré leur engagement pour la transparence, la bonne gouvernance et la responsabilité publique. Elles ont informé l’équipe du FMI que l’audit général des finances publiques est en cours de finalisation, et que les conclusions et recommandations qui en découleront devraient permettre de mettre en œuvre des réformes vigoureuses, afin de remettre les finances publiques sur une trajectoire de réduction du déficit et de l’endettement.
L’équipe du FMI exprime sa gratitude aux autorités et à l’ensemble des interlocuteurs pour leur excellente coopération, ainsi que pour les discussions franches et constructives menées au cours de la mission. Les discussions relatives aux deuxième et troisième revues combinées dans le cadre des accords FEC/MEDC et FRD sont provisoirement programmées pour fin octobre 2024.
JEAN PIERRE MALOU