« Sénégal moy Sonko » : « Le Sénégal, c’est Sonko » (en wolof). Au lendemain des élections législatives, c’est le titre détournant un célèbre slogan de campagne qu’a choisi le journal Le Quotidien, d’ordinaire plutôt critique. Le parti au pouvoir, sous la houlette du charismatique premier ministre Ousmane Sonko, se dirige vers une très large majorité absolue au Parlement.
Une victoire « incontestable »
Environ 7,3 millions d’électeurs étaient appelés dimanche à élire 165 députés, qui siégeront pour cinq ans. Les premières projections, révélées par les médias locaux, annoncent une majorité très « confortable » pour le Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité). « C’est la suite logique de la présidentielle », note Justin Correa, coordonnateur du parti pour une commune de Dakar. Le parti pourrait obtenir au moins 129 sièges. Six sont toujours en ballottage. L’opposition, déjà fragmentée, doit se contenter de la portion congrue.
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« C’est fini », lance Alioune Tine, fondateur du groupe de réflexion Afrikajom Center, parlant d’une véritable « déferlante ».«L’opposition, y compris le maire de Dakar, Barthélémy Dias, et l’ex-président Macky Sall, ont pris acte et félicité le Pastef. Ce “fair-play” est quelque chose de nouveau. La victoire est si nette qu’elle est incontestable. C’est une bonne chose. »
Le premier ministre Ousmane Sonko, qui a mené la campagne, réclamait aux électeurs les moyens de mettre en œuvre le programme de rupture et de transformation de l’État promis par son lieutenant, le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, élu en mars dernier.
« Pas le droit à l’échec »
« Le nouveau gouvernement, plébiscité, suscite beaucoup d’attentes sur l’impact espéré des ressources naturelles (les hydrocarbures) sur le développement du pays, la répartition équitable des richesses, l’emploi des jeunes », analyse Ousmane Diallo, chercheur à Amnesty International.
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« Les Sénégalais sont fatigués de la violence, de la contestation, de la haine. Ils ont placé énormément d’espoirs sur les promesses du tandem Bassirou Diomaye Faye-Ousmane Sonko. Ils vont être impatients, notamment sur le front social », affirme le chercheur Alioune Tine.
« Nous n’avons pas le droit à l’échec », lâche Oumar Alioune Kane, responsable de la communication au sein du Pastef, qui renvoie au grand plan de développement « Sénégal 2050 » présenté mi-octobre par le gouvernement. Pour briser le « cercle vicieux de ladépendance et dusous-développement », le nouvel exécutif propose une décentralisation de l’économie et une industrialisation du pays. L’objectif est de transformer les chaînes de la valeur, pour que les ressources halieutiques ou le coton soient mieux exploités sur place.
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Le pouvoir est également attendu sur le front de l’apaisement. Après une transition chaotique sous Macky Sall (au pouvoir de 2012 à 2024), qui a renoncé in extremis à un troisième mandat, puis une campagne législative marquée par des violences, les Sénégalais aspirent à la fin des pratiques décriées de l’ancienne administration : la corruption, l’enrichissement illicite et la justice politisée. « Les Sénégalais vont les surveiller de près… », assure Alioune Tine.