Qui peut prétendre faire de la politique sans coopération ?

Amandine Lebreton, directrice et porte-parole du collectif Pacte du pouvoir de vivre, expose les bienfaits de la coopération pour la revitalisation du sentiment démocratique.

TRIBUNE

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Amandine Lebreton, directrice et porte-parole du collectif Pacte du pouvoir de vivre, expose les bienfaits de la coopération pour la revitalisation du sentiment démocratique.

Depuis plusieurs années, le dialogue, la concertation, la coopération – si nécessaires à la construction des politiques publiques – ont été mis de côté par l’exécutif. La légitimité des corps intermédiaires, même, a pu être remise en cause : certains élus les voyant moins comme des partenaires que comme une contrainte supplémentaire à la mise en œuvre de leur action politique. Et pourtant. Qui peut prétendre faire de la politique sans coopération ?

Les défis – écologiques, sociaux, démocratiques, économiques – sont chaque jour plus aigus. Les transformations de notre société pour concilier les enjeux du XXIe siècle sont urgentes et nécessaires, mais complexes. On a donc besoin de toutes les énergies, et notamment de celles de la société civile organisée, dont l’expertise, l’expérience, les innovations sociales et écologiques ou encore la capacité à faire sont des atouts pour la nation.

Allons plus loin : coconstruire les politiques publiques est l’une des conditions de réussite des transitions écologiques et sociales. D’ailleurs, les citoyens ne s’y trompent pas. A l’occasion du sondage Ipsos pour le Pacte du pouvoir de vivre réalisé en avril 2023, 83 % des sondés disaient que la crise démocratique risquait d’empêcher la transition écologique et la justice sociale.

Il s’agit donc de faire autrement et de le faire vite, tant le fossé se creuse entre nos concitoyens et le personnel politique. Dans son récent rapport sur l’état du pays, le Cese montre que 76 % des Français pensent que les politiques sont déconnectés des réalités des citoyens. Alors comment «re-connecter» ? La société civile organisée a pour cela un rôle essentiel : elle est un trait d’union entre les citoyens et le monde politique. Elle fait le lien entre les vécus, les quotidiens, les existences de nos concitoyens et les politiques publiques. Les actions des associations, des syndicats comme des mutuelles sont construites à partir des préoccupations des personnes, de ce qui les touche, de ce qui les concerne. Alors que tout tend à diviser, ce rôle de trait d’union est indispensable à la société et indispensable pour revitaliser la démocratie.

Les 63 associations, fondations, syndicats, mutuelles qui composent le Pacte du pouvoir de vivre coconstruisent ensemble, depuis cinq ans, les contours d’un projet de société commun. Les facteurs qui leur permettent de mener ce travail sont les mêmes que ceux qui devraient guider les pouvoirs publics pour renforcer la démocratie.

D’abord, organiser des espaces qui permettent de construire la confiance. Aujourd’hui, ces espaces sont peu nombreux et /ou ponctuels, selon les ministères, voire les sujets. Le Conseil national de la refondation (CNR)aurait, par exemple, pu apporter une forme de réponse mais reste une occasion manquée.

Ensuite, s’inscrire dans le temps long afin de sortir de la communication politique permanente ou des consultations sans lendemain, qui abîment l’image de la politique mais aussi son efficacité.

Puis, accepter d’entrer dans le fond des sujets, de comprendre les enjeux des autres parties, leurs contraintes ou leurs marges de manœuvre. La complexité des politiques publiques à construire implique du travail.

Enfin, sortir de son couloir de nage. Notre alliance fait la démonstration qu’il est possible de garder un cap clair et de maintenir une exigence de résultat, tout en débattant des moyens, des calendriers, du partage des efforts et des responsabilités.

La coopération ne se décrète pas, elle se construit, et elle suppose à la fois une volonté continue de «faire avec» et un état d’esprit tourné vers le dialogue. C’est sur ces fondements que tous les projets, les actions, les expérimentations de politiques publiques qui font leurs preuves, notamment dans les territoires, s’appuient.

 

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