Le changement climatique est responsable de près d’un cinquième des cas de dengue, qui battent de nouveaux records en 2024, selon une étude américaine publiée samedi visant à éclai…
Pour mesurer l’impact du changement climatique sur la santé, « la dengue est une très bonne maladie à étudier car elle est très sensible au climat », explique à l’AFP Erin Mordecai, écologiste spécialisée dans les maladies infectieuses à l’université de Stanford. Transmise par les piqûres de moustiques « Aedes » infectés, cette maladie virale, qui peut provoquer une forte fièvre et des courbatures, est généralement bénigne mais parfois grave, voire mortelle.
La dengue est déjà endémique dans plus de 130 pays et, avec la hausse des températures, les moustiques vecteurs se propagent au-delà des zones tropicales et subtropicales où ils étaient généralement confinés. Très présente en Outre-mer –la Guadeloupe a été déclarée en état d’épidémie cette semaine-, des cas de dengue ont aussi été détectés dans l’Hexagone, notamment dans le sud ou en région parisienne.
Pour cette nouvelle étude, présentée lors du congrès annuel de la Société américaine de médecine tropicale et d’hygiène mais non encore évaluée par des pairs, une équipe de chercheurs s’est penchée sur l’incidence de la dengue et les variations climatiques dans 21 pays d’Asie et des Amériques. Ils estiment qu’environ 19 % des cas actuels de dengue en moyenne dans le monde « sont imputables au réchauffement climatique », a résumé Erin Mordecai, auteur principal de l’étude dévoilée alors que se tient la 29e conférence sur la dengue en Azerbaïdjan.
Les températures comprises entre 20 et 29 degrés Celsius sont les plus propices à la propagation de la maladie et les zones d’endémie dans ce contexte -certaines parties du Pérou, du Mexique, de la Bolivie et du Brésil- pourraient connaître une augmentation de 150 à 200%. À l’échelle mondiale, au moins 257 millions de personnes vivent actuellement dans des régions où le réchauffement climatique pourrait faire doubler l’incidence de la dengue au cours des 25 prochaines années.
Les bactéries à la rescousse
Au cours des huit premiers mois de 2024, il y a eu près de 13 millions de cas de dengue, selon l’Organisation mondiale de la santé, soit près du double du record enregistré pour l’ensemble de 2023. Le nombre réel est probablement plus proche de 100 millions étant donné la « sous-déclaration massive » des cas, notamment en raison du manque de tests ou de symptômes, a estimé Erin Mordecai. Outre le changement climatique, la mondialisation des échanges et des voyages ainsi que l’avancée de l’urbanisation favorisent la propagation du moustique tigre, Aedes albopictus, un des vecteurs du virus avec l’Aedes aegypti.
Une approche prometteuse pour lutter contre la dengue consiste à introduire dans la nature des moustiques infectés par des bactéries qui bloquent la capacité de l’insecte à transmettre le virus. Des moustiques infectés par la bactérie Wolbachia ont été introduits il y a cinq ans dans la majeure partie de la ville brésilienne de Niteroi, rapporte une autre étude présentée lors de la réunion annuelle, mais non évaluée par des pairs.
En 2024, alors que le Brésil était confronté à sa plus grande épidémie de dengue, cette ville proche de Rio de Janeiro n’a connu qu’une légère augmentation des cas, même si le nombre est resté inférieur de 90% à ce qu’il était avant cette expérience et sans commune mesure avec le reste du pays.
Preuve que la bactérie « Wolbachia peut assurer une protection durable contre les épidémies de dengue de plus en plus fréquentes à l’échelle mondiale », selon Katie Anders, l’une des responsables du Global Mosquito Program, citée dans un communiqué. Cette bactérie a aussi fait ses preuves en Nouvelle-Calédonie, où elle a été introduite en 2019 et a depuis fait nettement reculer le nombre de cas.
Avec AFP